Privatisation de la CHCL : plus de 600 emplois menacés



On la sentait venir. Ce qui n’était jusqu’ici  qu’une menace risque de se transformer en affreux cauchemar pour quelques 600 employés de la Cargo Handling Corporation Ltd(CHCL). Cette semaine le gouvernement a signifié son intention d’aller de l’avant avec son projet de s’allier avec un partenaire stratégique. Une réunion de haut niveau s’est tenu mardi au bureau du Premier Ministre (PMO) en présence de différentes parties prenantes dont la CHCL et la Mauritius Ports Authority (MPA), et aussi ceux qui sont intéressés à devenir le partenaire stratégique de la CHCL.  De plus le départ du Managing Director, Archimède Le cordier, à la retraite et la disparition l’année dernière de Mario Flore Modliar MSK, ont laissé le champ libre aux potentats du PMO qui souhaitent vendre le port du pays. Cela en totale contradiction avec l’esprit de démocratisons de l’économie.

 

Techniquement, il n’y aura pas de partenariat. Il s’agit purement et simplement d’un bradage d’un des bijoux de l’Etat sur lequel le secteur privé mauriciens et d’autres consortiums ont des visés précis. Il n’y aura ni partage, ni co-gestion. Mais un accord à l’avantage de ceux qui prétendront apporter l’expertise pour améliorer notre port qui est déjà le No 1 de la région. Un peu comme ce gouffre dans lequel le gouvernement a été englouti par les français de France Telecom et pour lequel nous payons le prix cher. Dans le port ce ne sera pas différent. Sauf que cette fois, c’est la sécurité de l’Etat qui est en jeu en laissant un secteur névralgique entre les mains du privé.

 

Le port et la Cargo Handling Corporation vit des moments d’angoisses. L’inquiétude se lit sur le visage de tout un chacun. Des faucons à l’intérieure du port militent ouvertement, même sans le savoir, pour le retour du privé dans le port. Or le port, c’est un secteur qui fait très bien. Il y a seulement un problème de manque de capital. Le gouvernement doit injecter de l’argent seulement pour le fonctionnement de l’institution car la Cargo Handling Corporation Ltd a atteint sa vitesse de croisière en matière de productivité, de rendement, de discipline etc. L’arrivée du secteur privé provoquera un dégraissage massif. Plus de 600 employés pourraient être concernés par cette situation.

 

Investissements et performances

La Cargo Handling Corporation (CHC) a investi Rs 1,775 milliard ces dix dernières années dans des équipements portuaires afin d’offrir un meilleur service à des prix compétitifs. Sans ces investissements, Port-Louis aurait été un port secondaire dans la région. La CHC a atteint aujourd’hui  un paramètre de 20 conteneurs par heure contre 12 à 14 il y a quelques années. Le temps d’attente des bateaux a été considérablement réduit passant de trois jours à 50 minutes, avant d’être servi. Idem pour le client qui est pris en charge en 20 minutes, lorsqu’il s’agit de livrer des conteneurs. La CHC a atteint un ” international bench marking “ sous l’impulsion de M. Lecordier.

 

Port-Louis est aujourd’hui un port fiable opérant 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7. Alors qu’à la Réunion, il indique que les activités cessent à 18 heures et sont étendues jusqu’à 22 ou 23 heures s’il y a une demande. 50 % du trafic portuaire concerne le transbordement. Ceci a une conséquence directe sur l’économie pourvoyant plus de possibilités aux importateurs et exportateurs dans leurs transactions. Selon les chiffres publiés par la CHC, on observe une hausse de 10,5 % du trafic des conteneurs. De janvier à septembre 2009, il y en a eu 211 158 contre 233 292 durant la même période cette année. Les activités de transbordement ont connu une croissance de 2 % durant la même période. 78 673 transbordements ont été enregistrés de janvier à septembre 2009 contre 80 244 de janvier à septembre 2010.

 

Finances

La Cargo Handling Corporation Ltd est dans une situation financière très difficile. Surtout, pour son incapacité de rembourser ses dettes qui s’élèvent, à fin mars 2011, à plus de Rs 600 millions, dont Rs 160 millions sont impayées depuis juillet 2010. Ce qui plombe les finances de la Mauritius Port Authority. Déjà, le non-remboursement des dettes, par la CHCL, commence à impacter négativement sur la MPA. À titre d’exemple, celle-ci est astreinte à rembourser de ses propres caisses un prêt de 1,2 million de dollars (Rs 36 millions), contracté auprès de l’European Investment Bank. Alors qu’elle avait prévu d’effectuer ce remboursement à partir de l’argent provenant de la vente de trois grues à la CHCL. Il sera très difficile, pour le gouvernement, de trouver un partenaire stratégique valable tant que la situation financière de la CHCL ne s’améliore pas. L’année dernière la CHC a accumulé des pertes s’élevant à environ Rs 70 millions mais à la fin de l’année financière se terminant au 30 juin dernier, après avoir payé ses acomptes, l’organisme a réalisé des profits de quelque Rs 6 millions.

 

Dans un aide-mémoire en date du 5 février 2007, le directeur de la Banque mondiale d’alors de la région Afrique avait indiqué que Port-Louis était bien placé pour jouer un rôle de premier plan sur la scène maritime régionale vu que la capitale de Maurice possède la logistique pour se développer en une plate-forme logistique de transbordement dans cette partie du monde. Ce rapport avait recommandé qu’un partenaire stratégique soit sélectionné pour la CHC pour profiter des avantages substantiels en termes de croissance du trafic de conteneurs et des investissements directs étrangers en raison des opportunités qui s’offrent à Maurice. Le port a de quoi être fier car il vient d’être primé meilleur port dans la région en 2010. Il devance Toamasina, Durban, Aden, Salalah, Colombo et Réunion. Sa performance est reconnue par toutes les lignes maritimes du monde. En une année, la CHC charge et décharge environ 400 000 conteneurs mais peut aussi aller jusqu’à 500 000. Elle a cinq portiques et une peut manipuler jusqu’à 100 000 conteneurs.

Le combat de Mario Flore et de la Port-Louis Harbour and Docks Workers Union

« Zordi pé fer presyon dans enn lot stratezik pou retourn sekter privé dans port. Nou koné ki le port li enn sekter kot gouvernema control gestion sekter privé, mai avek partener stratezik gouvernema pa pou ena oken control. Bann pli grand mobilisyon travayer finn kumance dan port. E zordi, bann kondisyon travay finn amelioré, grâce a  combat sindika port », ainsi disait feu Mario Flore MSK peu avant sa mort. Il était prêt à livrer cette dernière bataille avant sa retraite mais le destin en a voulu autrement. Mais la Port-Louis Harbour and Docks Workers Union(PLHDWU) continuera son combat pour empêcher au secteur privé de mettre le grappin sur le port.

« C’est une chose inacceptable après que la Cargo Handling Corporation ait investi plus de Rs 1, 4 milliards qu’on laisse le secteur privé récolter le fruit des durs labeurs des travailleurs et du management » explique M Alex Marie, président de la PLHDWU.

Le principal syndicat a entamé une série de consultations pour faire connaître sa position et le danger sur l’avenir du port avec l’arrivée d’un partenaire stratégique. «Il y a d’énormes risques pour la stabilité sociale, économique et politique du pays. On ne peut pas mettre un secteur névralgique dans les mains du secteur privé. Actuellement, il y a beaucoup de concertation entre le syndicat et le management. Les relations industrielles sont nettement mieux que dans les autres corps paraétatiques», explique M. Rama Valaydon, son secrétaire-général

Feu JBD : « Le gouvernement injectait de l’argent pour le développement portuaire mais en fin de compte c’est le secteur privé ki ti pe tap plein lor profit »

Feu James Burty David a eu ces mots quelques temps avant sa mort : ” CHCL se volonte SSR pou protez travayer kont bann ki donn linpresyon mars ek travayer alor ki zot gran konplis ek patron. ” Il  avait fait l’historique de la création de la Cargo Handling Corporation Limited (CHCL). ” Le port est un secteur névralgique ; le gouvernement injectait de l’argent pour le développement portuaire mais en fin de compte c’est le secteur privé ki ti pe tap plein lor profit “. Feu JBD a raconté comment en 1978, le Premier ministre d’alors, SSR, l’avait sollicité pour présenter une motion visant à instituer un Select Committee sur l’avenir du port – qui mènera à la création de la CHCL.

Valeur du jour, les actionnaires sont : le gouvernement avec 6 % d’actions, la State Investment Corporation (SIC) avec 54 % et la MPA avec 40 %.

Posted by on Nov 7 2011. Filed under Economie, Société. You can follow any responses to this entry through the RSS 2.0. You can leave a response or trackback to this entry

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