La Congolaise Elyse Muyamuna : Réussir est une question de détermination et de volonté



Par Carmel Placide Kanza

Il y a une décennie à peine, les filières de l’enseignement  technique étaient le domaine exclusif des hommes. Aujourd’hui avec l’évolution et l’intégration du concept du genre, de plus en plus de femmes occupent et exercent des professions qui étaient traditionnellement considérées la chasse gardée des hommes. Pendant longtemps, les Congolais ont soutenu que la Congolaise faisait exprès de s’exclure de ces professions parce que celles-ci étaient physiquement contraignantes. Or, le cas d’Elyse Muyamuna vient nous prouver le contraire.

Agée d’une cinquantaine d’années, Elyse Muyamuna est détentrice d’un diplôme de technicienne de laboratoire auprès de la Faculté de médecine de l’Université de Kinshasa. Depuis plusieurs années, elle est chargée des analyses des échantillons épidémiologiques auprès de l’Institut National de Recherches Biomédicales.

Ses missions et cours d’actualisation des connaissances en France et dans certains pays africains ont fait qu’Elyse Muyamuna ne prenne pas au sérieux l’argument que les femmes se sentent incapables d’être à la hauteur. «Les compétences existent et elles sont indépendantes du sexe des uns et des autres,» soutient-elle. «Seules comptent la volonté et la détermination,» ajoute-t-elle.

Cadette d’une famille de13 enfants, elle dit adorer son métier qui l’a rendue «encore plus indépendante» au point de lui faire supporter, voire d’oublier son célibat.  En la voyant s’exécuter dans son bureau avec minutie et prudence, on réalise que cette femme aime par-dessus tout son travail.

Elyse Muyamuna appelle toutes les femmes à se débarrasser des complexes qu’elles peuvent nourrir inconsciemment et  à exhiber leurs talents et leurs compétences. Pour preuve, elle cite les femmes d’hier et d’aujourd’hui qui ont pris leurs destinées en main au niveau international, à savoir Indira Gandhi, Simone Veil, Angela Merkel, Ellen Johnson-Sirleaf,

Les difficultés qu’elle rencontre sont de l’ordre opérationnel. En effet, en raison de la technicité de ses responsabilités, elle travaille presque tous les jours et bien qu’elle soit passionnée par ses tâches, cela la prive du repos dont elle a besoin et du temps de qualité qu’elle aurait pu consacrer à ses proches, amis(es) et connaissances.  «Il arrive parfois qu’il y ait tant d’analyses à faire que je passe deux à trois jours dans le laboratoire sans rentrer à la maison. Et c’est le cas en ce moment avec la résurgence du virus hémorragique Ebola dans le pays.  Mon sens de responsabilité prime sur tout le reste.»

Si aujourd’hui, elle est confirmée à son poste et respectée de tous, elle n’oublie pas qu’à ses débuts, un responsable d’établissement auprès de qui elle cherchait du travail, a accepté de lui en donner à condition qu’elle ait des rapports sexuels avec lui. «Il fallait que je passe un test et il m’a dit que quelque soit le résultat, il m’accepterait si je couchais avec lui. J’ai refusé. Je me suis tout de même soumise au test et je l’ai réussi». A la surprise de cet homme qui n’a pu que s’incliner.

Elle se dit qu’il y en a d’autres qui ont dû accepter cet odieux marchandage. «Les femmes doivent prouver qu’elles ont des compétences et ne pas vouloir tout avoir sur un plateau.» Elle va d’ailleurs plus loin en disant que la parité n’est pas une faveur ou un cadeau que l’on fait aux femmes. «Puisque l’on ne veut pas nous la donner, il nous faut l’imposer par des lois », estime-t-elle.

Selon elle, la meilleure façon de lutter contre la discrimination à l’égard des filles et des femmes est par le biais des études. «Les parents doivent d’abord donner cette chance aux filles. Une fois qu’elles ont pu continuer leur scolarité secondaire, elles doivent étudier d’arrache-pied et croire qu’il leur est possible d’arriver aussi loin que les hommes. Tout n’est qu’une question de détermination et de volonté».

Carmel Placide Kanza est journaliste en République Démocratique du Congo. Cet article fait partie du service de commentaires et d’opinions de Gender Links.

Posted by on Oct 5 2012. Filed under Monde. You can follow any responses to this entry through the RSS 2.0. You can leave a response or trackback to this entry

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