Intervention synodale Mgr Alain Harel
Saint Père,
Chers amis,
Dans nos îles de l’Ocean Indien , les pêcheurs ont l’habitude de placer des radeaux, hors lagon, en pleine mer. Ces plateformes flottantes sont reliées au fond marin par une chaîne et une ancre solides. Les poissons sont attirés par le radeau et viennent nager autour. Ainsi, les pêcheurs, s’ils acceptent de quitter le confort du lagon, de prendre la passe et d’affronter la haute mer, peuvent faire des prises fructueuses.
Le document préparatoire au synode décrit bien que de nombreux jeunes se retrouvent, de gré ou de force, ‘ en haute mer’ car vivant dans un monde en profonde mutation : économique, climatique, technologique, culturelle etc.
Par rapport à un tel contexte, plus que jamais, L’Église ne peut rester en sécurité à l’intérieur du lagon. Elle est invitée sans cesse à prendre la passe et à rejoindre les jeunes en haute mer, là où Jésus nous devance et nous attend. Sans nostalgie du passé – un passé souvent idéalisé — nous sommes invités à lever nos voiles et à permettre au vent de L’Esprit Saint de nous faire voguer vers le large, au-delà des récifs !
Oui, nous sommes invités à placer le « radeau-église » en pleine mer afin de rejoindre les jeunes. Ce radeau dont l’ancre est le Christ, celui qui nous relie à Dieu notre Père, Lui qui nous donne le dynamisme, le courage de faire face aux tempêtes mais aussi l’espérance. « Cette espérance, nous dit la lettre aux Hébreux, est pour nous comme une ancre de l’âme, bien fermement fixée, qui pénètre au-delà du voile, là ou est entré pour nous en précurseur, Jesus. » (Hébreux 6 vs 19-20)
Pour que le ‘radeau -église’ soit attirant, l’Église doit être d’abord et avant tout accueillante et en recherche permanente de cohérence. Notre propre expérience de pasteurs, pêcheurs d’hommes, nous fait découvrir chaque jour que les jeunes- de même que les enfants et les adultes- ne sont pas attirés par de beaux discours mais par la capacité d’accueil de nos communautés chrétiennes. L’Église est invitée à accueillir tout jeune à la manière de Jésus, c’est-à-dire, tel qu’il est, là où il est, sans jugement, en le croyant capable d’avancer, de grandir et même de nager à contre-courant.
Une fois accueilli, se sentant chez lui et à l’aise sur la ‘plateforme-église’ , nous sommes, me semble-t-il, invités (c’est ce que je tente, en lien avec les différents acteurs de la pastorale des jeunes, de promouvoir au sein du Vicariat Apostolique de Rodrigues) à promouvoir une pastorale des jeunes autour de 3 axes :
1) inviter les jeunes à vivre un engagement durable au sein d’un mouvement tel la JOC ou la Légion de Marie, d’un service tel Caritas ou d’une Chorale, ou encore au sein d’un regroupement de jeunes au niveau de la paroisse etc. Le jeune peut ainsi expérimenter la joie d’une vie en équipe faite de partage et d’amitié, d’entraide et de solidarité. Cette équipe est alors pour le jeune une école d’apprentissage qui lui donne le goût et les moyens de s’engager dans le concret de sa vie – d’étudiant ou de jeune travailleur, dans son village ou dans son milieu – à construire, à la suite de Jésus, un monde plus vivable inspiré des valeurs de l’Évangile. Les jeunes veulent passer à l’action, ils aspirent à un monde meilleur. l’Église doit encourager les jeunes à se salir les mains !
2) Proposer aux jeunes une formation chrétienne ouverte aux grandes interpellations et défis de notre temps. Les jeunes veulent donner sens à leur vie et toute pastorale des jeunes doit leur proposer un parcours de formation (une initiation) pour mieux rencontrer la personne de Jésus, pour développer un esprit critique, pour être à l’aise dans la modernité afin d’être « sel et lumière. »
3) Inviter les jeunes à vivre des célébrations vivantes qui, tout en tenant compte de la culture des jeunes – leur langage, leurs goûts musicaux, leur expression corporelle-, leur donne l’occasion de goûter la Parole de Dieu, d’accueillir Jésus, pain vivant, qui vient rejoindre leur faim de donner sens à leur vie. Les jeunes ont droit à des célébrations vivantes et recueillies, à des célébrations joyeuses et profondes. L’Esprit Saint nous invite à la créativité et ainsi permettre à Jésus Ressuscité de venir rejoindre les jeunes au cœur de leurs réalités.
Ces trois axes ne doivent pas être pris dans un ordre chronologique mais doivent sans cesse être articulés les uns aux autres.
Il me semble que c’est à cette condition que nous allons, comme nous y invite Jésus, pouvoir jeter nos filets et promouvoir une pastorale vocationnelle où chaque jeune pourra découvrir qu’il est appelé par Jesus. Jesus qui veut avoir besoin de ses mains, de ses pieds, de son intelligence mais surtout de son cœur pour qu’il devienne a son tour ‘ pêcheur d’autres jeunes’.
Dans notre monde où les familles vivent des grandes fragilités, je pense – et l’expérience vécue le prouve – qu’un autre jardin des vocations à cultiver est bien cette vie en communauté autour de ces 3 axes.
 
										 
		 
										











