Le journaliste Jean-Pierre Pernaut, incarnation du “13 Heures” de TF1 pendant plus de trente ans, est mort à 71 ans
Traité pour un cancer du poumon, il avait quitté la présentation du journal depuis 2020, et n’était plus apparu à l’antenne depuis décembre.
“C’est avec une immense douleur que nous avons appris la disparition de Jean-Pierre Pernaut”, a écrit TF1 dans un communiqué. “La télévision perd un de ses plus grands journalistes, TF1 un membre de sa famille”.
Son visage et son goût pour la France rurale étaient connus bien au-delà du cercle de ses téléspectateurs. Jean-Pierre Pernaut, ancien présentateur du journal de 13 heures de TF1, est mort mercredi 2 mars, a annoncé sa famille à l’AFP. Le journaliste avait présenté l’édition de la mi-journée de la première chaîne de 1988 à 2020. Il était âgé de 71 ans. “Le père de Tom, Lou, Olivier et Julia est décédé des suites de son cancer du poumon” mercredi après-midi, a déclaré à l’AFP l’agent de son épouse, Nathalie Marquay-Pernaut. Le journaliste avait annoncé sa maladie en novembre dernier, après avoir combattu un premier cancer, de la prostate, qui l’avait contraint à s’absenter de l’antenne en 2018.
L’artisan d’un journal moins centré sur Paris
Peu connu à sa nomination en 1988, celui qui a fait presque toute sa carrière à TF1 avait succédé à Yves Mourousi et transformé le “13 Heures” de la chaîne, lui permettant de rependre la tête des classements d’audience devant Antenne 2.
Il revendiquait notamment avec fierté la multiplication des correspondants régionaux, pour façonner un journal moins centré sur l’actualité parisienne, mais parfois accusé de présenter une carte-postale assez conservatrice de la France.
Depuis son départ du “13 Heures”, Jean-Pierre Pernaut continuait de présenter une émission hebdomadaire, “Jean-Pierre et vous”, sur LCI, et il avait lancé une chaîne en ligne, Jean-Pierre Pernaut TV, toujours dans le cadre du groupe TF1. Il n’était plus apparu à l’antenne depuis mi-décembre.
Même s’il se faisait plus rare à la télévision, il restait le 10e homme le mieux classé au palmarès des personnalités préférées des Français publié par le JDD en décembre et la personnalité médiatique la plus plébiscitée (avec Karine Le Marchand).
De nombreux hommages politiques
Emmanuel Macron a salué sur Twitter la “passion de la France” de Jean-Pierre Pernaut, tandis que le Premier ministre Jean Castex a évoqué la “voix familière” et le “visage rassurant” du présentateur. “Nous perdons un grand journaliste”, a réagi la ministre de la Culture Roselyne Bachelot.
Deuil profond
Il laisse son épouse Nathalie Marquay, Miss France 1987 avec qui il était marié depuis juin 2007, ainsi que Lou (19 ans) et Tom (18 ans), deux enfants nés de cette union. Jean-Pierre Pernaut était également le père de Julia (née en 1978 qui est gynécologue) et d’Olivier (né en 1981 qui est ingénieur), fruits de son premier mariage avec Dominique Bonnet. Jean-Pierre Pernaut était grand-père de trois petits-enfants : Iris et Eléa, les filles de Julia, et Léo, le fils d’Olivier. « J’ai une grande famille […]En haut de cette pyramide du coeur, il y a ma mère, qui va bientôt fêter ses 101 ans », déclarait-il dans les colonnes de Paris Match en 2016. Sa mère, Françoise, n’a jamais manqué un seul de ses JT jusqu’à ce qu’elle décède en novembre 2016.
Durant 33 ans, à 13 heures pile, son sourire, sa bonne humeur contagieuse et sa voix mélodieuse s’invitaient au cœur des foyers des Français et ont marqué plusieurs générations.
La naissance d’un grand journaliste
Jean-Pierre Pernaut né le 8 avril 1950 à Amiens (Somme), d’une mère pharmacienne et d’un père directeur d’une usine de machines-outils à Amiens.
Le 8 août 1972, il apparaît pour la première fois à la télévision. Il n’a que 22 ans et couvre, pour Nord Picardie Actualités, le sauvetage d’un enfant tombé dans un puits.
Trois ans plus tard, en 1975, il est diplômé de l’ESJ Lille. Après un stage au sein du quotidien Le Courrier Picard, il présente ses premiers JT au sein de la rédaction régionale de Picardie de l’ORTF.
Véritable pilier de TF1, il fait ses débuts sur la chaîne dès sa création, le 6 janvier 1975. Il présente le journal télévisé de 20 heures jusqu’en 1978.
De 1978 à 1980, il présente le JT de 13 heures aux côtés d’Yves Mourousi. De 1980 à 1982, il devient grand reporter au service économique.
Le présentateur de tous les records
Le 22 février 1988, Jean-Pierre Pernaut succède à Yves Mourousi et prend définitivement les rênes du JT de 13H de TF1. Il opère des changements pour rendre ce rendez-vous d’informations plus attractif et lui donner une nouvelle âme. Cela passe par le déploiement de correspondants régionaux, une première dans l’histoire du JT français. Les audiences progressent, sa popularité grandit.
Suivi chaque jour par six à sept millions de téléspectateurs, le JT LE 13H de TF1 est aussi le plus regardé d’Europe. Avec 33 ans de présence à l’antenne en milieu de journée, Jean-Pierre Pernaut détient le record de longévité de présentation d’un JT en Europe. Il assure plus de 7000 journaux télévisés et interviewe quatre présidents en exercice. Il est aussi le seul présentateur en France à ne pas utiliser de téléprompteur. Le journaliste aguerri se démarque par son apparente spontanéité. Il n’hésite pas à commenter les sujets diffusés par une rapide remarque émerveillée ou irritée mais aussi des expressions corporelles.
La ligne éditoriale est simple : « Le journal de 13H est le journal des Français, qui s’adresse en priorité aux Français et qui donne de l’information en priorité française. Vous voulez des nouvelles sur le Venezuela ? Regardez la chaîne vénézuelienne. Sur le Soudan ? Regardez les chaînes africaines », déclare-t-il un jour. Et de préciser : « Quand un gouvernement annonce une augmentation du minimum vieillesse, nous n’allons pas interviewer le ministre, mais les personnes âgées. Notre ambition : la proximité ».
Un rendez-vous assuré pendant trois décennies
S’il traite avant de sujets régionaux dans ses JT, Jean-Pierre Pernaut doit aussi faire face à des événements internationaux d’ampleur. En 1990, quatre ans après la catastrophe de Tchernobyl, il est le premier journaliste de télévision française autorisé à pénétrer dans la zone interdite durant une édition spéciale du JT.
Le 22 février 2013 marque ses 25 ans de présentation de journal télévisé. A cette occasion, TF1 diffuse un reportage qui retrace ce quart de siècle singulier. Le 22 février 2018, un JT entier lui est consacré pour célébrer ses 30 ans de présence au 13H.
En 2020, durant le premier confinement, Jean-Pierre Pernaut présente tout de même une partie du journal depuis un studio aménagé à son domicile, intitulée LE 13H à la maison.
Un adieu après 33 ans de JT
Jean-Pierre Pernaut présente son dernier journal télévisé LE 13H sur TF1 le 18 décembre 2020. Son ultime édition est suivie par 8,1 millions de téléspectateurs en moyenne. Après cette carrière remplie, le journaliste confie : « C’est 33 ans d’histoire du monde avec des éditions spéciales extraordinaires. À Tchernobyl, quatre ans après la catastrophe, on était les premiers occidentaux à pouvoir pénétrer dans la zone interdite […] Il y a eu des journaux sur les guerres du Golfe, sur le World Trade Center, en direct de New York, etc. Le JT du 18 décembre, c’est sûr que ça a été le journal émotionnellement le plus fort pour moi. Tellement de gens m’ont dit après qu’en regardant ce journal, ils avaient une petite larme au coin des yeux, ben moi aussi, mais je l’ai caché ».
Lors de son dernier JT, Jean-Pierre Pernaut s’ouvre avec émotion : « Il est temps pour moi de dire au revoir aux téléspectateurs. J’ai écrit un petit texte, je m’y prépare depuis des mois et pourtant j’ai du mal à garder la tête froide… Alors comment le pourrais-je après tant d’émotion, de surprises et surtout après 33 ans avec vous ? » La voix tremblante, il revient sur sa passion et sur ce rendez-vous quotidien avec les Français : « C’était un honneur de traverser la petite et la grande histoire du monde grâce à vous, votre fidélité et pour beaucoup celle de vos grands-parents et de vos parents. J’arrête le cœur serré. Merci à tous. Dernier au revoir. […] Merci, je vous aime. Je ne vous oublierai jamais ».