125 milliards $ pour les forêts : une opportunité pour l’Afrique mais des défis à relever



Soutenu par les BRICS, le Tropical Forest Forever Facility promet de rémunérer la préservation des forêts. Pour l’Afrique, c’est une opportunité majeure. Mais pour en bénéficier, les États doivent s’organiser.

Attendu pour un lancement officiel à la COP30, le Tropical Forest Forever Facility (TFFF), porté par les BRICS, pourrait marquer un tournant majeur dans l’accès au financement climatique. Doté de 125 milliards de dollars, ce mécanisme vise à rémunérer les pays tropicaux pour la préservation continue de leurs forêts, sur la base d’un forfait de 4 dollars par hectare préservé.

À la différence des dispositifs antérieurs comme REDD+, le TFFF introduit une logique plus incitative. Il récompense la conservation active et pénalise la dégradation, tout en réservant 20 % des ressources, soit jusqu’à 25 milliards de dollars, aux communautés locales et autochtones.

Pour l’Afrique, cette initiative arrive à point nommé. Le continent abrite le deuxième plus grand massif forestier tropical au monde, principalement concentré dans le bassin du Congo, et souffre d’un accès limité aux financements internationaux pour la conservation. Selon le Fonds mondial pour la nature (WWF), la région ne reçoit que 4% des financements globaux destinés aux forêts.

Sur le papier, elle est bien placée pour bénéficier de ce nouveau fonds. D’autant que la promesse d’un accès direct aux ressources pour les communautés répond à une revendication ancienne des sociétés civiles africaines, qui est d’éviter que les financements ne soient dilués dans les circuits gouvernementaux ou captés par des intermédiaires.

Mais pour que cette opportunité devienne réalité, il faut que l’Afrique soit prête. Or, à ce stade, peu de pays disposent des capacités institutionnelles, techniques ou communautaires nécessaires pour élaborer des projets éligibles dans les délais. Par exemple, selon le Programme des Nations Unies pour l’Environnement (PNUE, 2023), seulement une poignée de pays africains disposent de systèmes nationaux de surveillance forestière suffisamment robustes pour fournir des données fiables et traçables, un critère clé pour l’éligibilité aux financements liés à la conservation. De plus, la Banque Mondiale a souligné que la complexité des cadres juridiques sur la gestion foncière, souvent marqués par une forte coexistence entre droits coutumiers et légaux, rend difficile l’application homogène des mécanismes internationaux.

S’ajoute à cela une faible implication des acteurs africains dans la conception même du mécanisme, ce qui accroît le risque d’un modèle inadapté aux réalités locales. En effet, conçu par les BRICS sans consultation large des États africains, le TFFF risque d’ignorer leurs spécificités, comme les droits coutumiers. Seule l’Afrique du Sud a participé aux négociations, marginalisant des acteurs clés comme la Commission des Forêts d’Afrique Centrale (COMIFAC), l’unique instance d’orientation, de décision et de coordination des actions et initiatives sous-régionales en matière de conservation.

Pourtant, les enjeux sont importants. La pression sur les forêts africaines ne faiblit pas, alimentée par la pauvreté, l’exploitation minière, l’agriculture extensive, la dépendance au charbon de bois ou encore les projets d’infrastructure. Les populations vivant dans ou autour des forêts continuent d’être largement exclues des retombées économiques de la conservation, faute de mécanismes transparents et adaptés.

En Afrique, 60 % de la population dépend toujours des forêts pour ses moyens de subsistance, le bois constitue la principale source d’énergie pour 80 % des ménages ruraux, tandis que 40 % de leurs revenus proviennent des produits forestiers non ligneux tels que les fruits, les plantes médicinales, le miel ou encore le gibier.

Plusieurs organisations de protection de l’environnement et du climat comme Greenpeace ont déjà alerté que si les financements ne sont pas rapidement accessibles et les critères clarifiés, le TFFF risque de reproduire les mêmes travers que les mécanismes précédents.

Posted by on Jul 13 2025. Filed under Actualités, Economie, En Direct, Featured, Sci-Tech. You can follow any responses to this entry through the RSS 2.0. You can leave a response or trackback to this entry

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