Les gros procès judiciaires pour l’année 2022…
D’importants procès marqueront le calendrier juridique cette année. Beaucoup d’affaires ont une portée politique. L’année 2022 débutera comme s’est terminé l’année 2021 au niveau du judiciaire, soit avec les pétitions électorales contestant certains résultats des législatives de 2019, en Cour suprême.
Une année riche en événements sur le plan politico-judiciaire. La Cour suprême, en congé, reprendra pleinement ses activités à partir du 10 janvier. Pour cette nouvelle année, les affaires reprendront encore de plus belle dans les salles d’audience des cours de justice, avec des “high-profile cases” qui n’ont pas encore connu de conclusions, comme le cas de Bernard Maigrot aux Assises.
Pétitions électorales
Les pétitions électorales logées par les candidats battus du Parti travailliste, du MMM et du PMSD, aux élections de 2019, seront prises sur le fond dès le premier trimestre du calendrier judiciaire de 2022.
Celle de Cader Sayed-Hossen contre Gilbert Bablee à La Caverne/ Phoenix, le 2 février, sera de celle de Navin Ramgoolam à Montagne Blanche/Grand-Rivière-Sud-Ouest, le 14 février. Certaines de ces pétitions électorales ont été déjà entendues en 2021. Navin Ramgoolam a terminé à la quatrième place avec 17 536 voix. Il a été devancé par les trois candidats de l’Alliance Morisien. Nommément Vikram Hurdoyal (23 252 voix), Zahid Nazurally (18 459 voix) et Sunil Bholah (18 174 voix). Le leader du PTr demande l’invalidation des résultats des trois candidats pour irrégularités. Il souhaite un nouveau décompte partiel des votes que ces derniers et lui ont recueillis. Et réclame une nouvelle élection au n°10.
Ezra Jhuboo à Savanne/Rivière Noire, a été débouté, tandis que les jugements sont attendus dans celles d’Adrien Duval, à Curepipe/Midlands et de Suren Dayal à Moka/Quartier Militaire.
Sans compter l’affaire logé par le Premier ministre Pravind Jugnauth contre Surren Dayal pour contester sa démarche d’avoir recours à une Private Prosecution en ce qui concerne les dépenses électorales au No 8. Le chef du gouvernement sera défendu par Mes Désiré Basset SC, Ravind Chetty SC et Raouf Gulbul. Tandis que les avocats Antoine Domingue et Roshi Badhain paraissent pour le candidat battu du PTr.
C’est le 10 janvier 2022 que le Premier ministre, Pravind Jugnauth, devra se présenter devant la Cour suprême. Sa motion réclamant l’annulation de la « private prosecution » de Surren Dayal sera débattue. C’est le 18 octobre 2021, devant le tribunal de Port-Louis, que le candidat battu du PTR a déposé une « private prosecution » contre le chef du gouvernement. Surren Dayal accuse le chef du gouvernement d’avoir fait une fausse déclaration concernant ses dépenses électorales. Il se base sur les « Kistnen Papers. Le 26 octobre 2021, l’ancien chef juge Asraf Caunhye a accédé à la requête du Premier ministre. Pravind Jugnauth avait demandé le gel de la « private prosecution » le temps que la Cour suprême examine sa motion sur le fond.
La plainte constitutionnelle de Dev Sunnasy et Ivor Tan Yan, candidats battus du parti 100 % citoyens dans la circonscription n°19, Stanley–Rose-Hill, et de deux électeurs du n°8, Moka–Quartier-Militaire, à savoir Neelam Narayen et Goindamah Nirmala Narayen, sera appelée le 17 mai 2022 devant la Master’s Court. Ils réclament l’invalidation des résultats des législatives du 7 novembre 2019 dans les 21 circonscriptions de Maurice et la tenue de nouvelles élections générales. La plainte, rédigée par l’avoué Hiren Jankee, est dirigée contre l’État, le commissaire électoral, l’Electoral Supervisory Commission, la State Informatics Limited, la Mauritius Broadcasting Corporation et l’Independent Broadcasting Authority. Ces derniers sont cités comme défendeurs dans la plainte. Les plaignants ont retenu les services de l’avocat Neelkanth Dulloo.
Plaintes constitutionnelles contre le Speaker, le Cybercrime Act et l’IBA Act
Toujours au niveau politique, d’autres procès retiendront l’attention. Les députés travaillistes Arvin Boolell et Shakeel Mohammed ont logé des plaintes constitutionnelles contre le Speaker de l’Assemblée nationale, pour donner suite à leurs suspensions de l’hémicycle. Le cas d’Arvin Boolell sera entendu le 4 février.
La contestation du Cybersecurity and Cybercrime Act et de l’Independant Broadcasting Authority Act, votés fin de l’année dernière, sera également suivie avec intérêt. Des plaintes formelles sont en voie de finalisation apprend-t-on dans les milieux proches de l’Opposition.
Affaire Kistnen
La décision du Bureau du Directeur des poursuites publiques, quant à la suite à donner à l’affaire Kistnen, est aussi attendue en ce début d’année. L’enquête judiciaire sur la mort suspecte de cet agent politique du MSM a défrayé la chronique pendant de longs mois, l’année dernière.
Vaccination et pass obligatoire
Neuf enseignants et parents d’élèves retourneront en Cour suprême le 27 janvier pour insister sur l’illégalité de la vaccination obligatoire. Ils sont nommément Denis Franco Thierry Jean, enseignant au St Benoit RCA ; Diane Hardy, enseignante au Telfair International Primary School ; Thérèse Lincoln, enseignante à l’Ecole du Centre ; Sayed Ameer Ahmed Seid Ally, enseignant à l’école du gouvernement Marcel Cabon ; Shamita Joynathsing-Ramprogus, responsable des ressources humaines à KPMG ; Francois Miguel Amaury De Brugada Vila, retraité de Curepipe ; Anne-Marie Adrienne Odile James, retraitée de Grand-Baie ; Joseph Hervé Stephane Hardy (l’époux de Diane Hardy) ; et Bruneau Laurette, Maritime Security Operations Leader. L’affaire sera appelée le 27 janvier 2022 devant la Master’s Court de la Cour suprême.Le ministre Kailesh Jagutpal, pour sa part, cité comme défendeur, objecte à des amendements à la plainte des contestataires. Dans cette bataille judiciaire s’ajoutent aussi sept activistes et travailleurs sociaux, qui contestent l’obligation du “pass sanitaire” pour avoir accès aux institutions spécifiée.
Affaire Sun Tan
Le directeur des poursuites publiques, Me Satyajit Boolell, affronte l’ICAC dans le cadre de sa révision judiciaire en Cour suprême, contestant ainsi sa convocation devant cette instance dans le sillage de l’affaire Sun Tan. La commission anti-corruption souhaitait convoquer le DPP “under warning”, mais ce dernier avait saisi un juge en référé pour obtenir une injonction interdisant l’ICAC de le convoquer et l’arrêter, le 14 juillet 2015. Entre-temps, le DPP a logé sa demande de révision judiciaire. Les débats autour de cette action légale auront lieu le 7 février.
Affaire Sunkai : la requête des victimes
Des victimes du Ponzi Scheme orchestré par la directrice de Sunkai Co Ltd, Bhimla Ramloll, attendent toujours l’obtention d’un ordre de la Cour suprême pour le dégel d’environ Rs 273 millions, représentant l’argent saisi de la fraude qui doit leur être remboursé. Avec leurs conseils légaux, les procédures légales se poursuivent, avec un passage devant un juge en référé le 7 janvier et l’appel de l’affaire en Cour suprême le 24 du même mois. Au total, 1 047 victimes demandent le remboursement de leurs investissements depuis que cette affaire a éclaté, en 2012. Par ailleurs, Bhimla Ramloll et son époux sont aussi poursuivis devant la Financial Crimes Division pour escroquerie et blanchiment d’argent dans cette affaire. L’ex-élue municipale travailliste de Quatre-Bornes affectueusement surnommé Madame Cabas, et son époux Mohit Ramloll se présenteront, le 17 janvier 2021, devant la FCD. Leur procès a débuté en 2021. Ils sont accusés d’avoir entre septembre 2012 et mars 2013, escroqué une somme de Rs 753 857 800 à plusieurs investisseurs. Le couple plaide non coupable.
Affaire Boskalis : l’ultime recours de Siddick Chady
Siddick Chady, ex-chairman de la Mauritius Ports Authority, empêtré dans l’affaire Boskalis pour pot-de-vin, a vu son appel contre sa condamnation de 9 mois de prison rejeté par la cour d’appel. En plus de cela, la cour a rallongé sa peine de prison à 15 mois. Il souhaite désormais avoir recours au Privy Council pour contester cette décision de la cour d’appel, rendue le 29 septembre 2021. Il évoque ainsi un “gross miscarriage of justice”. Dans sa demande en Cour suprême, il souhaite le gel de la décision de la cour d’appel et demande à obtenir l’autorisation de faire appel au conseil privé. Le State Law Office, qui représente le DPP, s’oppose à sa demande de “Leave”. Le contre-affidavit est attendu le 10 janvier.
Révision judiciaire de Teeluckdharry
L’ancien deputy-speaker Sanjeev Teeluckdharry réclame une révision judiciaire des conclusions de la commission d’enquête sur la drogue contre lui dans son rapport. L’homme de loi souhaite réfuter les critiques émises sur sa conduite. Sanjeev Teeluckdharry n’a pas maché ses mots contre le président de la Commission, l’ancien juge Paul Lam Shang Leen. Choyé aujourd’hui dans les médias à cause de sa position anti-gouvernementale, il avait été à l’époque vilipendé par cette même presse avant même de pouvoir se défendre.
Appel du DPP contre l’acquittement des policiers dans l’affaire Toofany
Le sergent Vikash Persand et les constables Jean François Numa et Joshan Raggoo ne sont pas encore sortis d’affaires après leurs relaxes en Cour Intermédiaire le 3 août 2020. Ils étaient accusés d’avoir torturé Iqbal Toofanny, 42 ans. Cet habitant de Vacoas est décédé le 2 mars 2015 à l’hôpital Victoria, Candos, alors qu’il était sous garde policière. Deux de leurs collègues, les constables Johny Laboudeuse et Ghislain Marie Ronny Vincent Gaiqui sont décédés entretemps. Le Directeur des poursuites publiques (DPP) a fait appel. L’affaire sera entendue le 14 février 2022 en Cour suprême.
Affaire du notaire Deelchand
C’est le 14 mars 2022 que le procès qu’intente le Directeur des poursuites publiques au notaire Vinay Deelchand sera appelé devant la cour intermédiaire. Il répond d’une accusation d’entente délictueuse avec ses acolytes. C’est une transaction foncière qui aurait mal tourné qui serait à l’origine de cette affaire. L’homme d’affaires Anwar Toorabally avait vendu un terrain à un habitant de Terre-Rouge, mais n’avait pas obtenu l’intégralité du paiement.
Selon l’acte d’accusation, le notaire et ses acolytes auraient ourdi un complot avec le dénommé Antoine Chetty pour incendier la maison d’Anwar Toorabally. L’attaque au cocktail Molotov a eu lieu le 17 août 2000. Si la maison avait été épargnée, son 4×4 avait pris feu. Les quatre prévenus avaient déjà fait face à un procès devant la cour intermédiaire pour le même délit. Reconnus coupables, ils avaient bénéficié de la liberté surveillée contre une caution de Rs 100 000 chacun. Aussi, ils devaient bien se tenir pour une période de trois ans. Au cas contraire, ils auraient purgé trois ans de prison. Après le verdict, ils avaient fait appel de leur condamnation. En appel, la Cour suprême a ordonné un nouveau procès. Le notaire et ses acolytes plaident non coupables.
Affaire Whitedot
C’est une affaire qui a fait couler beaucoup d’encre à l’époque. Les délits auraient été commis entre 2008 et 2013. Ils auraient comploté pour commettre des fraudes au préjudice des investisseurs de Whitedot International Consultancy Ltd à qui des rendements alléchants avaient été promis. Or selon la Financial Services Commission, la compagnie opérait sans permis. Plusieurs investisseurs ont traîné en justice Whitedot International Consultancy Ltd en Cour suprême pour réclamer le remboursement de leurs investissements et des dommages pour les préjudices subis. Dix-sept témoins ont été assignés dans ce procès. L’affaire Whitedot sera écoutée sur le fond le 6 avril 2022, devant la cour intermédiaire. Au banc des accusés, l’on retrouve Arun Mossuddee, Bheemul Bissessur, Govinduth Lutchman, Dylan Lutchman et Priya Soty.
De son côté, l’ICAC a logé un procès contre Mossuddee, Bissessur et Govinduth Lutchmun pour blanchiment d’argent devant la Financial Crime Division. Le premier nommé répond de 20 accusations de blanchiment d’argent. Les délits auraient été commis entre le 22 mars 2012 et le 19 mars 2013, à la Mauritius Commercial Bank de Port-Louis et Ébène. Il est reproché à Arun Mossuddee d’avoir blanchi une somme totale de Rs 19 510 005.
Quant à Bheemal Bissessur, il fait face à 10 accusations de blanchiment d’argent, d’un montant total de Rs 9 660 360. Les délits ont eu lieu à Ébène, Rose-Hill et à la SBM de Port-Louis. Govinduth Lutchmun, quant à lui, répond de 11 accusations de blanchiment d’argent. Il aurait blanchi au total la somme de Rs 4 389 102,84. Selon les actes d’accusation, l’argent que les trois prévenus ont blanchi aurait été obtenu de façon illicite dans le sillage de l’affaire Whitedot.
Thierry Lagesse devant la FCD
Le procès intenté à Thierry Lagesse, Ashish Kumar Seeburrun et Dhanishwar Toolsee pour fraude fiscale alléguée se poursuivra du 8 au 10 mars 2022 devant la Financial Crime Division. Ils plaident non coupables. Thierry Lagesse est poursuivi devant la FCD pour entente délictueuse et évasion fiscale à l’importation d’une voiture de luxe, une Mercedes Benz SLS63 AMG, en décembre 2010. Ashish Kumar Seeburrun et Dhanishwar Toolsee répondent aussi d’une accusation d’entente délictueuse. L’homme d’affaires fait également l’objet d’une accusation de « possession of goods on which excise duty has not been paid ». Tandis qu’Ashish Kumar Seeburrun répond d’une accusation de « swearing false affidavit ».
Commission d’enquête sur Betamax
Par ailleurs nous suivrons avec intérêt, les travaux de la Commission d’enquête sur Betamax. Le but de cette commission d’enquête est de mettre en lumière les circonstances dans lesquelles la société Betamax a reçu le contrat d’affrètement en 2011 et les circonstances dans lesquelles ce contrat a été résilié. C’est la juge Carol Jokhoo-Green qui préside cette commission et a pour assesseurs, Kodados Mosafeer et Telkraj Parbhunath. Cette commission d’enquête a été mise en place après que le Privy Council a donné gain de cause à Betamax et a sommé la State Trading Corporation (STC) et l’Etat de payer près de Rs 5,6 milliards.
Le directeur général de l’organisme, Rajiv Servansingh, a fait ressortir lors de sa déposition que ce contrat était inhabituel et peu commun. « Suite aux documents qui ont été présentés, nous avons pu constater que l’allocation du contrat à Betamax Ltd était très inhabituelle. Il y aura prochainement les déballages de documents et nous allons encore entendre parler des choses troublantes qui ressortiront dans l’affaire. » déclare l’avocat de la STC, Ravi Rutnah. Les travaux de la Commission reprendront le 20 janvier 2022.