Produits à la consommation : La flambée persiste malgré la baisse des prix du fret maritime
Depuis plusieurs temps, les prix du fret maritime ont commencé à baisser. Les prix des conteneurs chutent fortement en raison de la baisse de la demande de produits chinois. Il est passé sous la barre des 4 000 dollars fin septembre pour la première fois en deux ans. Tout récemment, le prix a encore baissé de 8 %, à 3 688 dollars par conteneur. Mais cela ne se répercute pas encore sur le panier de la ménagère. Comment expliquer ce décalage ? Et, si le cout du fret chute, qu’en est-il du prix des produits ? Eléments de réponses dans ce dossier.
Les perspectives d’évolution du marché du transport maritime conteneurisé restent très incertaines pour 2023. En effet, l’inflation mondiale et le contexte géopolitique ont engendré une baisse significative de la demande, entraînant une chute des taux de fret qui retrouvent un niveau que l’on pourrait qualifier de « normal ». Une chose est sûre : la notion de « super profits » engrangés par les compagnies maritimes en 2022 ne sera plus de circonstance en 2023, avancent les experts dans la presse mondiale. Toutefois, à Maurice, rien n’est noté dans ce sens. Depuis plusieurs mois, le panier de la ménagère en prend un sérieux coup avec la hausse des prix des produits. La raison : le coût du fret ne cesse de grimper. C’est le public au final qui doit casquer. A maintes reprises les importateurs se sont plaints de la hausse du fret. Certains qui importaient des produits alimentaires du Pakistan et de l’Inde, disaient souffrir « le martyre ». Le fret est passé de $ 1 200 à $ 6 500. On doit payer, certes, mais on passe obligatoirement cette hausse aux consommateurs, avait déclaré l’un d’entre eux. Ajoutant que l’appréciation du billet vert n’arrange pas les choses, le dollar américain est passé de Rs 33 à Rs 43, soit Rs 10 de plus.
Le prix du transport au plus bas
Cependant le prix du transport par conteneur a connu une forte baisse récemment, après les records enregistrés pendant la crise liée au Covid-19. La raison : la réduction de la demande des biens en provenance de Chine. Ces dernières semaines, le prix des transports est tombé à son niveau le plus bas depuis des années. Pour le transport d’un conteneur de 40 pieds de Shanghai à Los Angeles, le prix est passé sous la barre des 4 000 dollars fin septembre pour la première fois en deux ans. La semaine dernière, le prix a encore baissé de 8 %, à 3 688 dollars par conteneur.
En comparaison, en septembre 2021, la même expédition avait coûté plus de 10 370 dollars par conteneur, un record. En revanche, le prix reste plus du double de la moyenne de la pandémie de corona (1 420 $). Pourtant la surchauffe des prix semble loin d’être terminée.
Si les tarifs de fret ont pris une courbe descendante depuis quelques mois, à l’échelle mondiale, les consommateurs peuvent légitimement espérer une baisse de prix des produits et aliments en rayons. Mais l’affaire n’est pas si simple, et il semble que les consommateurs devront continuer à mettre la main à la poche.
Selon une étude de la CNUCED, qui vient d’ailleurs d’être rendue publique, on indique que le secteur maritime devra investir davantage dans les infrastructures et la durabilité des chaînes logistiques, pour surmonter les crises futures : « Depuis deux ans, la crise des chaînes d’approvisionnement a démontré qu’une inadéquation entre la demande et l’offre de capacités logistiques maritimes entraîne une hausse des taux de fret, une congestion et des ruptures importantes sur les chaînes de valeur mondiales,» déclarent les experts dans la presse internationale. Ajoutant que le chaos maritime entraîné par la pandémie et récemment la guerre Ukraine-Russie, connaît cependant une accalmie depuis les trois derniers mois avec les tarifs de fret qui tendent à partir à la baisse. « Avant le Covid, un conteneur de 40 pieds sur l’Asie coûtait environ USD 1 500. Pendant le Covid, ce prix a grimpé jusqu’à USD 12 000 à 15 000. Et actuellement, il faut compter environ USD 6 000, disent-ils.
Selon les médias, les prix du fret maritime s’effondrent et se rapprochent des niveaux d’avant-Covid. Les taux de fret, qui s’étaient envolés pendant la crise du Covid, retrouvent désormais des niveaux approchants ceux de 2019. Le prix d’un conteneur de 40 pieds s’est affiché à 2.500 dollars début décembre, contre 11.000 dollars en septembre 2021. La raison est simple : les tarifs du transport maritime se calent sur la consommation mondiale, laquelle fléchit avec la dégradation de l’économie mondiale.
C’est clair que les prix ont chuté. Certains l’expliquent par le refroidissement de l’économie mondiale, les exportations de la Chine ralentissent alors que cette période est normalement la saison de pointe pour le transport de conteneurs. Or, il y a moins de consommation et de production. Le commerce extérieur est donc également en baisse. À son tour, la Chine elle-même importe moins.
Décalage
Pourquoi la baisse du fret ne se reflète pas sur les produits ? Les spécialistes du transport et de la logistique, précisent que c’est le temps nécessaire à l’application effective d’une baisse du fret sur les marchandises. En réalité, il faut compter entre 4 à 5 mois avant de commencer à ressentir cette baisse, le temps que les importateurs et commerçants épuisent les stocks des marchandises achetés à des tarifs élevés. Et puis, il faut aussi noter que la baisse des tarifs du fret maritime concerne surtout tout ce qui est spot et pas forcément l’ensemble des conteneurs affrétés par un gros navire.
Renégociation des contrats
De plus on indique aussi que pour les compagnies maritimes, cela signifie que leur rentabilité est sous pression. Ces dernières années, elles ont pleinement profité des prix records.
D’autre part, cela met également fin à la congestion de nombreux ports. Les clients ayant conclu des contrats à long terme coûteux avec des compagnies maritimes veulent maintenant les renégocier.
De nombreux nouveaux navires ont été commandés au cours de la période écoulée. Si ces derniers entrent en service à partir de l’année prochaine, les prix des conteneurs pourraient chuter encore plus, déclare l’analyste Lee Klaskow à Bloomberg.
Est-ce une bonne chose ?
Dans la presse internationale on soutient que cette baisse n’est pas forcément un bon signe.
L’indice du transport mondial du vrac sec (minerais, charbon, céréales…) a plongé en janvier 2023. Ce baromètre du commerce mondial anticipe un ralentissement rapide de l’économie des Etats-Unis, de l’Europe et de la Chine. Le géant asiatique joue un rôle central sur le marché du fret maritime.
D’ailleurs, l’indice Baltic Dry, qui mesure l’activité du transport maritime de vrac sec (minerais, charbon, céréales…), a chuté spectaculairement. Cet indice fait partie des indicateurs avancés en matière de prévisions pour l’économie mondiale. Autrement dit, si cette baisse se poursuit, les risques de récession augmentent. Le décrochage de la première semaine de 2023 est violent mais la tendance date de plusieurs semaines. Sur un mois, l’indice accuse un recul de 17,7%, et sur un an de 50%.
Comment expliquer cette baisse des prix du fret ; est-ce dû à un semblant de retour à la normale sur le plan maritime ? Non, répondent les experts. : « Il y a la question de l’offre et de la demande et nous voyons depuis quelques mois que – face aux difficultés persistantes d’acheminement de marchandises par voie maritime et le fret exorbitant – beaucoup de pays utilisent maintenant des modes alternatifs de transport, surtout par voie terrestre. C’est le cas notamment à travers la Route de la Soie, entre l’Asie et l’Europe, qui permet de contourner les problèmes du shipping. »
Quoiqu’il en soit, avec la baisse des tarifs de fret, dans certains milieux logistiques on ne peut espérer que cela aura un effet positif sur les prix des produits et que le consommateur en sortira gagnant. Mais Martin Kröger, CEO de German Shipowners’ Association, n’est pas du même avis. Dans Hellenic Shipping News, une publication spécialisée, il expliquait récemment que les coûts de fret ne représentent qu’une petite proportion des prix de produits en rayons : “He even thinks that freight rates are not going to fall any further, as additional expenditures for shippers caused, for example, by higher environmental standards would cost “a lot of money.”
“High prices in grocery stores for some time”
Un point de vue partagé par certains cadres évoluant dans la logistique à Maurice. Ces derniers ont souligné qu’il a encore à jongler avec les effets de la guerre et à l’acheminement des matières premières qui posent toujours beaucoup de difficultés sans oublier le coût de ces matières premières qui grimpe avec la hausse de l’inflation dans les pays concernés.
Ajoutant que les prix gonflent à cause des matières premières et du fret aussi quand nous achetons un produit dans un pays, nous l’achetons avec l’inflation dans le pays d’origine, et cela veut dire malheureusement que même si le coût du fret part à la baisse actuellement, les prix peuvent rester inchangés dans les supermarchés et magasins.
Hors texte
L’évolution des coûts du fret
En 2019, le conteneur 20 pieds pour les pays de l’Est, dont la Chine, Singapour et la Malaisie, coûtait USD 800. Le conteneur de 20 pieds d’Inde, de Dubaï ou du Pakistan coûtait USD 850 en décembre 2019 et pour l’Europe, le conteneur coûtait USD 1000 en décembre 2019 toujours.
En octobre 2022, le conteneur de 20 pieds sur l’Europe coûtait EUR 2 469 et EUR 3 090 pour le conteneur de 40 pieds. Celui de 20 pieds couvrant les pays de l’Est, dont la Chine, Singapour et la Malaisie coûtait USD 4 000 et celui de 40 pieds, USD 7 175. Le conteneur de 20 pieds d’Inde, de Dubaï ou du Pakistan coûtait USD 3 700 et celui de 40 pieds coûtait USD 5 500.
Au début de février, le conteneur de 20 pieds couvrant les pays de l’Est, dont la Chine, Singapour et la Malaisie, coûte USD 2 000 et celui de 40 pieds, USD 4 000. Le conteneur de 20 pieds d’Inde, de Dubaï ou du Pakistan est aussi à USD 2 000 et celui de 40 pieds à USD 2 700. En ce qui concerne l’Europe, celui de 20 pieds est à USD 2 000 et celui de 40 pieds varie entre USD 2 800 et USD 3 000.
Il est bon quand même de noter que le marché étant pour l’instant encore volatil.
Hors texte
En 6 ans le prix du poulet a augmenté de 50%
Dans son premier rapport de surveillance des prix des produits de base, paru le 10 avril, la Competition Commission a dénoncé le fait que malgré un repli sur le marché mondial, aucune baisse n’est à noter à Maurice.
Ce rapport s’est penché sur les augmentations concernant quatre produits de base : l’huile, le lait, le fromage et le poulet. Ainsi, la commission note que les prix locaux des huiles alimentaires sont en baisse. Toutefois, l’ampleur de la réduction est inférieure à celle de l’indice mondial des prix des huiles, qui a reculé de plus de 42 % entre mars 2022 et décembre 2022.
Alors que le poulet a augmenté de 50%, de janvier 2017 à décembre 2022. Alors qu’au niveau mondial, l’indice des prix a crû de seulement 23,8 %. Il ajoute que pour le lait et le fromage, certains facteurs peuvent expliquer la hausse.
Ce rapport indique aussi que de janvier 2022 à décembre 2022, les indices locaux des prix des denrées alimentaires sont passés de 120,8 points à 151,1 points, ce qui représente une hausse d’environ 25 %. Cette augmentation globale a été plus accentuée sur cette courte période que pendant la période de la pandémie. Une majoration significative, de 52,4 % des indices de prix des huiles végétales et de 22,9 % des produits laitiers a été observée.