Karowe, la petite mine africaine qui a livré 6 des 10 plus gros diamants de l’histoire



Depuis 1905, le Cullinan, découvert en Afrique du Sud, est le diamant le plus gros de l’histoire minière. Mais ces dernières années, c’est au Botswana voisin qu’il faut aller chercher les plus gros diamants du monde, particulièrement dans une mine appartenant au canadien Lucara.

Au Botswana, une mine détenue par une compagnie canadienne a livré un diamant de 2492 carats, le deuxième plus gros diamant jamais découvert. Alors que la nouvelle fait le tour du monde depuis le 21 août, elle n’a pas surpris outre mesure les observateurs avertis de l’industrie diamantifère mondiale, au sein de laquelle la mine Karowe possède déjà une solide réputation.

Présentée officiellement au monde par le président du Botswana, Mokgweetsi Masisi, la pierre est en effet la dernière des cinq diamants de plus de 1000 carats livrés par Karowe depuis 2015.

Cette année-là, et trois ans après la mise en service de la mine en 2012, le canadien Lucara Diamond découvre une gemme exceptionnelle de 1109 carats : Lesedi la Rona. Diamant exceptionnel par la taille, c’est le 5e plus gros diamant au monde, mais aussi par la qualité, car il s’agit d’un diamant de type IIa. Seulement 1 à 2 % des diamants, d’une pureté unique, sont classés dans cette catégorie.

En 2019, Karowe se fait à nouveau connaitre avec une découverte historique, celle d’un diamant de 1758 carats : le Sewelô. En langue locale, ce nom qui signifie « trouvaille rare » s’applique bien à la pierre qui s’est alors classée comme le deuxième plus gros diamant de l’histoire, derrière le Cullinan. Désormais relégué à la troisième place par le diamant de 2492 carats, Sewelô reste néanmoins le deuxième plus gros diamant jamais livré à Karowe.

Les deux derniers diamants de plus de 1000 carats livrés par la mine de Lucara ont été récupérés en 2021 et en 2023. Il s’agit respectivement d’une pierre de 1174 carats et d’une pierre de 1080 carats. D’autres diamants de grandes tailles ont aussi été découverts à Karowe, comme une pierre de 998 carats en 2020 et une autre de 813 carats, dénommée Constellation, récupérée en 2015.

La technologie derrière le succès

Outre le potentiel évident de Karowe pour les gros diamants, Lucara attribue aussi son succès à une technologie de détection par rayons X installée en 2017 sur la mine. Dénommée Mega Diamond Recovery, elle permet à la compagnie d’identifier et de récupérer les diamants de grande taille, en minimisant les risques de les casser.

Grâce à cette technologie, Lucara a réussi à se positionner comme un acteur clé du secteur des diamants au Botswana, malgré sa faible contribution à la production nationale. En 2023, la mine Karowe a en effet livré 395 134 carats en 2023, soit moins de 1% de la production de diamants du Botswana. Notons que la compagnie canadienne détient Karowe à 100 %, mais verse une redevance de 10% au gouvernement botswanais. Elle est également assujettie à un impôt sur les bénéfices dont le taux variable va de 22% au minimum à 55% au maximum.

Botswana, terre de gros diamants

Le Botswana est le premier producteur mondial de diamants, quand on tient seulement compte de la valeur des diamants produits, et le deuxième producteur mondial en volume. Le pays doit essentiellement ce statut à son partenariat avec De Beers, qui lui a permis de produire 24,7 millions de carats en 2023, soit 98% de la production nationale.

La compagnie originaire d’Afrique du Sud a aussi contribué à bâtir la réputation du pays comme l’un des fournisseurs de gros diamants au monde. En 2021, la mine Jwaneng (qui fait partie de la coentreprise Debswana  entre De Beers et le gouvernement) a ainsi livré un diamant de 1098 carats. Au total, ce sont donc 7 des 10 plus gros diamants de l’histoire qui proviennent du Botswana.

L’Afrique du Sud garde néanmoins le leadership, avec le Cullinan de 3106 carats, découvert en 1905. Cette pierre exceptionnelle a ensuite été taillée en plusieurs diamants moins gros, dont certains font aujourd’hui partie des joyaux de la couronne britannique.

Que rapportent les diamants au Botswana ?

En 2023, le Botswana a généré 3,5 milliards $ de revenus d’exportations grâce à ses diamants. Ces pierres précieuses représentent chaque année 80% des exportations du pays, et environ 30% du PIB du Botswana. En tant que premier producteur du pays, De Beers représente le principal pourvoyeur de recettes dans le secteur des diamants. En 2023, la filiale d’Anglo American a renouvelé pour 10 ans un partenariat de plusieurs décennies avec le gouvernement, avec des termes encore plus avantageux pour le Botswana.

 

Dès la mise en œuvre du nouvel accord, le négociant national de diamants du Botswana, Okavango Diamond Company (ODC) recevra 30% de la production de Debswana, contre 25% précédemment. Cette part augmentera au fur et à mesure de la décennie pour atteindre 50% de la production d’ici la dernière année de l’accord. Les diamants représentent ainsi un tiers des revenus fiscaux du gouvernement botswanais.

Nécessaire diversification de l’économie

Cette contribution importante des diamants à l’économie constitue toutefois un couteau à double tranchant pour les autorités, car les fluctuations sur le marché des diamants affectent directement l’économie locale. Depuis la pandémie de Covid-19 et la crise qu’elle a entrainé sur le marché des diamants, le Botswana a ainsi accéléré la diversification de son économie en général, et du secteur minier en particulier.

De Beers s’est aussi engagé à créer un fonds de développement économique doté d’un investissement initial de 1 milliard de pulas (environ 75 millions $). La contribution totale de la compagnie au fonds pourrait atteindre 10 milliards de pulas étalés sur 10 ans. Dans le secteur minier, une industrie cuprifère est aussi en émergence, marquée l’année dernière par le rachat d’une mine de cuivre par le chinois MMG pour 1,9 milliard de dollars.

En attendant les fruits de ces efforts, l’économie locale est toujours portée par l’exploitation des diamants. En 2024, la Banque africaine de développement prévoit que la croissance économique devrait s’accélérer, passant de 2,7 % en 2023 à 4,0 %, grâce à la reprise des ventes de diamants. Le secteur a en effet connu l’année dernière une baisse importante de la demande et des prix, dans un contexte de ralentissement de l’économie mondiale.

« Pour que le Botswana réussisse dans ses efforts de diversification en s’éloignant des diamants, il est nécessaire de réduire l’implication du gouvernement dans l’activité économique, afin de permettre au secteur privé de se développer », rappelle néanmoins l’institution panafricaine, dans son rapport pays publié en juillet 2024.

Posted by on Aug 27 2024. Filed under Sci-Tech. You can follow any responses to this entry through the RSS 2.0. You can leave a response or trackback to this entry

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